vendredi 10 juin 2016

L'HUMANITE: UNE RESPONSABILITE PAS TRES PARTAGEE

L’idée de ce titre m’est venue pendant la lecture du rapport de Ban Ki Moon, Secrétaire Général des Nations  Unies  en prélude au  Sommet Humanitaire mondial tenu à Istanbul en mai dernier. Ce document a la particularité d’illustrer parfaitement le drame humanitaire que connait le monde. Très curieusement,  après la Sainte Bible, c’est le document qui fait le plus allusion à l’humanité, au bien être des hommes, à la paix … quelques semaines  après la tenue du sommet qu’il annonçait je suis revenu à la réalité. Les mots utilisés dans les discours n’engagent que ceux qui y croient. Il suffit d’observer la société internationale pour le comprendre.

Un monde divisé en deux catégories

Deux grands groupes de pays forment la société internationale, d’une part les pays « développés » et d’autres part ceux qui «  courent après le développement » (sous-développés ou en voie de développement depuis bientôt un cinquantenaire). Ce sont des peuples dont les réalités n’ont rien en commun.
En effet, personne n’ignore qu’une partie du globe, spécifiquement l’Afrique croule sous le poids de la pauvreté, on y rencontre sous scolarisation, épidémies, les guerres fratricides, l’endettement illimité, des millions de déplacés internes et réfugiés, les fonds de la mer méditerranée sont pleins de cadavres de millions d’africains  fuyant la misère… bref les drames de ce côté du monde sont devenus banal.
De l’autre côté se trouvent les dirigeants du monde, je le dis parce qu’on y retrouve les membres du conseil de sécurité des Nations Unies, ils fixent les règles dans toutes les sphères de la vie internationales ( l’économie mondiale, le commerce), garant de la démocratie, défenseurs des droits et libertés… bref ils fixent les règles du jeu des Relations Internationales, ce sont les plus riches et les plus puissants, les armées les plus puissantes[1] s’y trouvent.
Voilà le décor dans lequel se trouve le monde lorsque monsieur Ban Ki Moon convoque un sommet international pour réunir autour de la table les Chefs d’Etats et tous les autres acteurs impliqués dans les questions humanitaires. Seulement il a vraisemblablement oublié de se rappeler un principe fondamental des Relations Internationales, l’individualisme et le caractère amoral de la politique. Ce sont ces caractéristiques qui déterminent l’adhésion ou non des puissances occidentales aux dynamiques initiées pour le changement  d’un certain nombre de pratiques systémiques jugées néfaste pour l’humanité. J’ai en mémoire le boycott de plusieurs initiatives similaires.

Le boycott des initiatives favorables à  un changement de paradigme

En effet, il est courant que des initiatives internationales visent à terme un changement important dans la conduite des activités, force est de constater que les plus importantes selon moi qui visaient des résultats concrets dans la situation des hommes et leur intégrité physique ont été boycottées, notamment : le protocole de Kyoto, le statut de Rome.
Le protocole de Kyoto : ouvert à la ratification le 16 mars 1998 et entré en vigueur en février 2005  avait pour objectif de stabiliser les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère car il est clair que l’activité humaine a des effets néfastes sur le système climatique. Les USA et la Chine, deux des plus importants pollueurs de la planète n’ont pas ratifié cet accord qui selon eux revêt des aspects contraignants pour leurs économies.

De même, le statut de Rome instituant la Cour Pénale internationale (CPI), une institution chargée de juger les crimes contre l’humanité, crimes d’agression et les crimes de guerre. En fait cette institution est sensée veiller au respect du Droit international humanitaire (DIH), garantir la protection des hommes, femmes et enfants durant les conflits. Les USA et la Russie n’ont pas ratifié cet accord pour des raisons politiques pourtant ces deux puissances sont impliquées dans la majorité  des conflits en cours dans le monde.
A ces deux initiatives on peut ajouter Le Sommet humanitaire mondial convoqué en mai dernier à Istanbul par les Nations Unies. Il a réuni 9000 participants, 55 chefs d’Etat dont aucun membre permanent  du conseil de sécurité, Angela Merkel la Chancelière allemande était le  seul leader du  G7 présent. Vladimir Poutine, le Président russe a d’ailleurs signifié dans une correspondance aux Nations Unies que les Etats membres de l’ONU ne seront pas tenus de partager les engagements approuvés par ce sommet. En d’autres termes, les résolutions prises pour diminuer la souffrance des millions de personnes ne concernent que ceux qui s’y engagent.

Leçons à tirer
-          Les discours sur l’humanité c’est l’affaire de ceux qui sont en souffrance
-          Les intérêts politiques sont plus importants que le sort des millions d’êtres humains qui croulent sous le poids des conflits et autres crises humanitaires qui en résultent.
-          Investir dans l’armement est plus important que toute cause humanitaire (le budget de la défense des USA s’élevait à 577 milliards de dollars en 2015 soit 1,8 milliard de dollars de budget militaire par jour. De quoi couvrir tous les besoins humanitaires pendant des années)
-          Les crises humanitaires sont appelées à se multiplier inévitablement (la nouvelle guerre mondiale engagée contre le terrorisme fait gagner énormément d’argent à l’industrie de l’armement, il ne faut pas s’attendre à une baisse de la production pour des raisons d’humanité.)

Certains me diront que le système humanitaire international est financé par les pays occidentaux mais j’ai la faiblesse de penser que ce système doit être aboli parce que les discours sur l’humanité qui serait une responsabilité commune c’est de la poudre aux yeux. Le monde est gouverné par les plus forts qui fixent les règles selon leurs intérêts. Si des millions d’hommes, femmes et enfants sont massacrées avec des armes russes ou américaines par  exemple cela n’empêche pas d’en fabriquer d’avantage. Dans un monde régi par la terreur  et la loi du plus fort, le sommet humanitaire mondial ne peut pas changer grand-chose.


                                                                                           Achille Valery MENGO


[1] http://www.mondialisation.ca/18-milliard-de-par-jour-cest-le-budget-militaire-us-officiel-finance-par-le-reste-du-monde/5422747

5 commentaires:

  1. Et si la misère et la souffrance étaient des drames universels? A mon avis, on les retrouve partout, avec des connotations et des colorations différentes. Réfugiés politiques ou économiques, déplacements à cause des guerres, de la famine, exclus sociaux et j'en passe. C'est peut-être plus "exotique" pour les médias occidentaux de parler de la misère de l'Afrique et moins "honorable" de parler de celle qui existe chez eux. Mais je crois qu'il existe des formes de misères assez graves partout et qu'il convient de gérer.

    Serge de Nkol-obang

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    1. Serge, il est indubitable que la misère est universelle, le but de cette note n'est pas de s'apitoyer du sort de l'Afrique qui selon moi est le berceau de la joie de vivre. je veux juste montrer que les initiatives comme le dernier sommet humanitaire mondial peuvent difficilement changer la situation humanitaire dans le monde, si on se rappele du protocole de Kyoto, le statut de Rome pour ne citer que ceux là on comprend clairement l'absence des leaders du monde à Istanbul en mai dernier. en somme lorsque les interets economiques et politiques ne sont pas garantis, ne comptez pas sur certains pour aborder la question de vos souffrances.

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  2. Serge de Nkol-Obang14 juin 2016 à 12:47

    J'ai bien compris. Mais à l'orée de ton propos, tu sembles dire que d'un côté il y a la misère et de l'autre côté les dirigeants du monde. Je suis d'accord que les dirigeants du monde se recrutent principalement en occident. Mais mon propos est que la misère, elle ne choisit pas ses cibles. Elle est partout!

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    1. d'accord Serge, que pense tu alors du boycott des grandes puissances et pense tu que les sommet puissent y changer quelque chose? moi je crois que non

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    2. Serge de Nkol-Obang14 juin 2016 à 15:12

      Sur ce point, je crois que ces sommets visent simplement à faire croire que les dirigeants du monde sont humanistes. Mais ce n'est pas vrai. Si les grandes puissances les boycottent, c'est qu'ils ne veulent pas se voir opposer quelques rares résolutions "obligatoires" ou "contraignantes" qui en sortiraient. Effectivement, comme tu le dis, ces sommets comme beaucoup de grand-messes ne servent à rien!

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